Face à l’effondrement du vivant : l’urgence de revoir notre rapport au sol
- Conférence-débat organisée par Chronik et animée par John Creamer, à l’Académie du Climat (Paris 4e)
- Invité : Marc-André Selosse, Professeur du Muséum national d’Histoire naturelle et à l’Institut Universitaire de France
Présentation :
Le sol, avenir de la Terre ? Et si les solutions aux défis posés par le réchauffement climatique se trouvaient dans nos sols ?
La teneur en CO2 de l’atmosphère n’est qu’une seule des limites avec lesquelles il nous faut apprendre à composer si nous voulons préserver une planète viable pour les générations à venir. Alors que nous parvenons à peine à appréhender les écosystèmes dont dépendent nos existences, certains sont encore largement ignorés. C’est notamment le cas des sols. Mélange de matière organique et de minéraux libérés par la roche-mère, à la fois éponge, composteur, réservoir de biodiversité, ou encore patrimoine mondial, les sols font et défont les mondes que nous habitons.
Capable de retenir 50 à 400 litres d’eau par mètre carré, le sol joue un rôle essentiel dans le cycle de l’eau, redistribuant les apports de la pluie vers les rivières, les nappes phréatiques ou les renvoyant vers l’atmosphère par l’intermédiaire des plantes qu’il supporte et nourrit. Ses pores retiennent également des gaz, au premier chef duquel le gaz carbonique et joue ainsi un rôle clé dans la régulation de l’effet de serre.
Bien plus qu’un amalgame statique de matière solide, liquide ou gazeuse, le sol est en réalité un processus dynamique incessant. Gigantesque pourrissoir, toute la matière qui tombe sur le sol est décomposée puis réorganisée pour que la vie puisse renaitre ailleurs: vous-même êtes le résultat de ce processus.
C’est l’incroyable diversité des organismes qui habitent le sol qui le rendent « vivant ». Situé entre l’atmosphère et la croute terrestre, cette mince « zone critique » qui ne représente tout au plus que quelque centaines de mètre comporte en réalité 60 à 80% de la biomasse des écosystèmes terrestre (vivante ou morte) et 26% des espèces connues (contre seulement 14% dans l’océan par exemple). Dans 1 gramme de sol forestier sec de nos régions, il y a ainsi 100 000 à 10 millions de bactéries appartenant à plusieurs milliers d’espèces différentes; les filaments ou spores de milliers d’espèces de champignons; un millier d’amibes variées et de ciliés d’une centaine d’espèces, plusieurs millions d’algues unicellulaires, de plusieurs dizaines d’espèces si le sol est de surface et de 10 à 1000 millions de virus d’un nombre d’espèce… encore largement inconnu !
C’est de cette richesse organique et minérale que dépend la fertilité des sols qui nous nourrissent, et nourrissent les nombreux écosystèmes qui en dépendent : les forêts, les villes, les montagnes, même les cours d’eau et les océans qui dépendent des nutriments que les sols charrient par l’érosion.
Mais au-delà de notre présent, le sol porte les vestiges de tout ce qui lui a précédé. La tierra preta d’Amazonie, particulièrement fertile, est ainsi le résultat de l’activité humaine qui a eu cours des millénaires auparavant. Encore plus loin dans le temps, c’est dans le sol que se trouve la mémoire des climats passés pendant des millions d’années. Mais regardons plutôt vers l’avenir : le sol est aussi l’héritage que nous laissons aux générations futures. Car si les sols sont renouvelables, ils sont le produit de cycles qui prennent plusieurs siècles voire millénaires à atteindre leur climax : « nous héritons donc de nos sols et l’empruntons aux générations suivantes » (1).
Alors qu’en France nous recouvrons l’équivalent d’un département comme le Var par du béton tous les 10 ans, que l’agriculture, l’élevage et l’irrigation mal faite abiment nos sols de plus en plus gravement, nous commençons à peine à comprendre le rôle fondamental que joue les sols dans la régulation de nos espaces vitaux. En dépit de l’indifférence générale, de plus en plus de chercheurs, de scientifiques et de citoyens s’intéressent à ce qui se passe sous nos pieds.
Parmi eux, Marc-André Selosse, Professeur du Muséum national d’Histoire naturelle spécialisé dans l’étude des sols, en particulier les questions de symbioses impliquant les champignons, les microbes, l’écologie et l’évolution, viendra partager sa passion et ses réflexions et échanger avec nous autour du thème « Face à l’effondrement du vivant : l’urgence de revoir notre rapport au sol ». Comment reconstruire notre rapport au sol ? Quelles issues face aux ravages de l’agriculture intensive et l’artificialisation à tout va ? Quel rôle pour le politique et le citoyen ?
Réponse le 15 Mars, avec Chronik à l’Académie du Climat.
- Quand ? Le mercredi 15 mars à 19h.
- Où ? À l’Académie du Climat, 2 place Baudoyer, Paris 4e – salle des Mariages (2e étage)
Entrée libre.
- Cette citation en particulier et ce texte en général sont basé sur le livre de Marc-André Selosse, L’origine du monde : une histoire naturelle du sol à l’intention de ceux qui le piétinent (Actes Sud, 2021).
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